
Martin Aeschbacher, Ambassadeur de Suisse au Qatar, nous a reçues à l’ambassade – très joliment revêtue des couleurs helvétiques – pour parler de la communauté suisse et des différentes activités proposées par la représentation. Il est également revenu sur la semaine de la francophonie.
Qatar Actu : Monsieur l’ambassadeur, quel est votre parcours ?
Martin Aeschbacher : Je suis originaire de Berne, en Suisse alémanique. À l’âge de 19 ans, je voulais partir à l’aventure avant de commencer mes études supérieures. Je suis donc allé en Éthiopie pendant un an dans les montagnes. Puis, je suis rentré en Suisse où j’ai étudié durant trois ans l’islamologie à l’Université de Berne. Pour mettre en pratique ce que j’avais appris, je me suis ensuite rendu en Syrie ; j’y suis resté deux ans entre Damas et Alep. Je suis ensuite de nouveau rentré à Berne où j’ai terminé mon cycle d’études d’arabe et d’histoire.
Je me suis lancé dans la vie active en travaillant pendant un an au CICR (Comité international de la Croix Rouge) avant de rentrer dans la diplomatie. Disons que je suis devenu diplomate par le biais de l’arabe.
Mon premier poste n’avait aucun lien avec le monde arabe : j’ai eu la chance de commencer par Moscou, de 1985 à 1989, et de vivre les dernières années de l’Union soviétique. J’ai ensuite été envoyé en Égypte, de 1989 jusqu’en 1992, date de mon retour à Berne où j’ai travaillé dans la section Moyen-Orient, qui couvre la région de l’Égypte à l’Iran.
Après mon passage en administration centrale, j’ai été muté à Prague, de 1996 à 2000, puis brièvement à Paris jusqu’en 2003. Je suis retourné dans la région en étant muté à Bagdad, juste après la guerre. J’ai occupé ce poste jusqu’en 2006, pour me rendre ensuite en Lybie pendant un an et demi. À l’issue de cette période, le ministère des Affaires étrangères m’a envoyé en Syrie où je suis resté de fin 2007 à août 2011.
Je suis à Doha depuis février 2012. Au début j’étais seul pour ouvrir la représentation suisse au Qatar ce qui a été une expérience fort intéressante et enrichissante.
Qatar Actu : Quels sont les principaux accords bilatéraux entre la Suisse et le Qatar ?
Martin Aeschbacher : Nous avons des accords standards avec le Qatar, tels que l’accord de protection des investissements, celui relatif à la double imposition, l’accord sur l’aviation civile… En un mot, les classiques de la diplomatie.
Néanmoins, il est intéressant de savoir qu’il y a un accord de libre échange qui a été négocié entre l’AELE (Suisse, Norvège, Islande et Liechtenstein) et le CCG (Conseil de Coopération du Golfe). L’accord a été signé mais il n’est pas encore ratifié. Quand il le sera, cela donnera un nouvel essor aux relations entre la Suisse et le Qatar.
Qatar Actu : Quelles sont les principales relations entre les deux pays ?
Martin Aeschbacher : Nous avons de très bons rapports au niveau politique.
Je voudrais souligner qu’il y a des similitudes entre la Suisse et le Qatar : ce sont de petits pays assez riches, qui ont de grands voisins et qui sur la scène internationale jouent parfois un rôle de médiateur.
Sur le plan des individus, les Qataris apprécient beaucoup la Suisse, ils ont souvent des propriétés aux alentours de Genève.
Il y a également un intérêt du côté des entreprises suisses pour le marché qatari, en raison des nombreux investissements prévus dans le pays. Nous n’avons pas encore obtenu de gros contrats, mais comme vous le savez la Suisse est plus portée sur les produits de haute qualité.
Les investissements qataris en Suisse se sont majoritairement portés sur le secteur de l’hôtellerie. Katara Hospitality a par exemple racheté un hôtel à Berne, le Schweizerhof qui est déjà ouvert et un autre hôtel à Lausanne en cours de rénovation. Ils ont par ailleurs fait un très gros investissement à Bürgenstock, en haut du lac des quatre cantons, où il y a un complexe historique d’hôtels et de spas.
Le Qatar a également investi dans le Crédit Suisse.
Qatar Actu : Y-a-t-il des entreprises suisses implantées au Qatar ?
Martin Aeschbacher : Une vingtaine d’entreprises suisses sont présentes au Qatar, telles que ABB et le Crédit Suisse.
La chaîne hôtelière suisse Mövenpick est aussi présente au Qatar.
L’industrie de l’horlogerie travaille quant à elle avec des distributeurs locaux. Ces entreprises se rendent au Qatar lors des expositions ou du salon de la joaillerie.
Qatar Actu : Quelle est la taille de la communauté suisse au Qatar ?
Martin Aeschbacher : Nous comptons un peu plus de 200 ressortissants, en incluant les enfants. La communauté suisse est bien répartie dans les branches professionnelles : certains sont pilotes, d’autres travaillent à Qatar University, à Georgetown, à Qatar Holding, dans le sport et dans l’hôtellerie bien évidemment.
Notre communauté augmente petit à petit. Lorsque je suis arrivé nous étions 120 et je suis sûr que la courbe va continuer à croître, même si cela va se faire lentement.
Qatar Actu : Quels sont vos objectifs pour 2014 ?
Martin Aeschbacher : Nous voulons continuer à consolider les services de l’ambassade puisque nous sommes une représentation relativement jeune.
L’ambassade souhaite aussi aider les entreprises suisses qui veulent s’installer au Qatar, c’est une tâche majeure pour nous.
Sur le plan des activités, notons le festival du film alémanique, organisé en collaboration avec les allemands et les autrichiens, qui se déroulera au début du mois d’avril à Katara.
Ce n’est pas encore confirmé, mais nous travaillons au lancement d’un festival de jazz européen au mois de mai.
Par ailleurs, l’hôtel Grand Hyatt va accueillir une semaine gastronomique suisse. Parallèlement nous allons organiser une foire de l’éducation qui s’étalera sur trois jours. Des écoles et des universités suisses seront présentes pour promouvoir l’éducation suisse. Il y a néanmoins déjà des partenariats, en particulier entre l’école d’interprétariat de l’Université de Genève et Hamad University, par exemple.
Qatar Actu : Quel est votre bilan de la semaine de la francophonie ?
Martin Aeschbacher : Je pense que la semaine de la francophonie s’est très bien passée. Nous avons eu un très généreux soutien de la part du ministère de la Culture, et je tiens à ce titre à remercier son ministre chaleureusement. Comme le Qatar est maintenant membre associé de l’Organisation Internationale de la francophonie, la manifestation a été plus importante cette année. Je suis sûr qu’elle revêtira encore plus de faste l’année prochaine.
Pour le moment nous ne sommes que quatre pays organisateurs. J’espère que lors des événements futurs, d’autres pays participeront à son organisation, notamment les pays africains puisque la francophonie englobe de nombreux États.
Propos recueillis par Karine Jammal et Patricia Gendrey
Categories: Francophonie
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